CRITIQUES DE LIVRES
CENT ANS AUX PYRÉNÉES
par Henri BERALDI
(
Les Amis du Livre pyrénéen, Pau. 1977. Nouvelle édition. 7 vol. )
(Revue " La Montagne et Alpinisme " - No 3, 1980)
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En rééditant Cent Ans aux Pyrénées, de H. Béraldi. Les Amis du Livre pyrénéen ont offert aux amateurs de littérature montagnarde le moyen de lire commodément cette oeuvre monumentale à laquelle il est si volontiers fait référence sans toujours l'avoir lue. |
Certes le procédé a ses écueils dont la partialité n'est pas le moins dangereux. Car, pour Béraldi, «l'idéal du pyrénéiste est de savoir à la fois ascensionner, écrire et sentir.» Au conquérant privé d'un brin de plume.. point d'intérêt : Béraldi ne les recherche pas. Sauf quelques grands guides, Barrot de la Maladetta ou Célestin Passet pour ne citer qu'eux, dont la réputation trouve grâce auprès de cet auteur. Mais tous les autres y sont, pourvu qu'ils aient écrit ne fusse qu'une ligne. Ce procédé possède aussi ses mérites. L'intérêt rebondit sans cesse au hasard des lectures. Anatomie du style, comparaison d'horaires, citations Iittéraires, connaissance géographique.. analyse psychologique des auteurs fondée sur une infinie subtilité sur des trésors de recoupement, humour, philosophie un brin désabusée sur l'alpinisme que les comparaisons chronologiques rendent parfois dérisoires et même. dans les derniers volumes, de virulentes attaques contre un certain cafisme, celui des conquérants grégaires "qui emplissent le silence des monts de leurs yahous". Ces propos ont-ils vieilli depuis l'édition originale parue entre 1898 et 1904 ? Non. L'attrait de ces pages s'est modifié.. voilà tout. Les exploits que révélait la première édition.. celle des officiers géodésiens gravissant le Balaïtous en 1824 et stationnant dix jours au sommet en dépit de la tempête pour assurer leur travail de triangulation sont aujourd'hui des chapitres connus de la conquête pyrénéenne. Ce qui apparaît, en revanche. aujourd'hui. c'est une perspective. A propos de protection de la forêt et des estives, de la manière dont évolue la fréquentation des sommets, de la pratique associative orientée vers la montagne, notre connaissance prend du champ.. cent et quelques années de recul, de quoi sabrer les inutilités de la mode pour ne conserver que l'essence. Sans doute est-ce là le mérite suprême de cette oeuvre, qui, si elle ne se Iit pas toujours comme un roman, conserve un intérêt constant. Pour ces raisons, beaucoup de lecteurs, même non pyrénéens, seront captivés par ce grand livre et seront reconnaissants aux Amis du Livre pyrénéen d'avoir eu le courage de rééditer Cent Ans aux Pyrénées. |
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