Bien sûr, tout un chacun est l'ami de Pierre Mazeaud
mais par delà cette amitié dont l'universalité peut
agacer, nombre de portraits tranchent par leur diversité avec le
conformisme ambiant qui consiste à n'égratigner personne.
II ne s'agit ni de faire un bilan, ni de porter un jugement sur les individus
: seulement des brèves notations, des anecdotes, des impressions.
Expert ès digressions, l'auteur nous emmène faire nombre
de visites impromptues : de Yannick Seigneur à Christian Brincourt,
de l'E.N.S.A. à la Compagnie des Guides de Chamonix, du Syndicat
National de l'Education Physique au Parti Communiste, du président
du Comité de l'Himalaya à Claude Francillon journaliste
au Monde, de la F.S.G.T. à la Fédération Française
de la Montagne, cette narration nous emmène beaucoup plus loin
que l'Everest.
Mazeaud ne fait pas d'autocensure, crève les abcès, décrit
les conflits sans les enrober de sucreries. Telle est, entre les lignes
entre les camps la substance du livre.
Du bon usage de l'écrit
"On m'a toujours reproché finalement ce qui n'est que franchise"
(p.92). Cette affirmation est exacte et discutable en même temps.
II est exact que, devant un dénigrement et un climat assez hostile
dans certains milieux, Mazeaud a toujours été parfaitement
clair sur ses intentions "l'important c'est qu'on en parle"
(p.72).
Mais important pour qui ? Important pour quoi ?
Cette affirmation est également discutable dans la mesure où
ce livre, par-delà la description d'une expédition, applique
sa franchise à des explications qui ressemblent fort à des
règlements de compte. Entre le président du Comité
de l'Himalaya injustement accusé d'avoir tenté de dissuader
l'un des membres de prendre part à l'expédition, et une
société fabriquant du matériel d'alpinisme qui, ayant
accordé un très important soutien à cette équipe,
n'a droit qu'à la malédiction prononcée par le chef
de l'expédition, il n'est pas certain qu'un grand service ait été
rendu à tous ceux qui souhaitent partir en expédition. Pourquoi
donc cette vindicte à l'égard d'un certain nombre de personnes
et d'organisations ?
Pierre Mazeaud use (abuse ?) de la position de force de l'ancien Secrétaire
d'Ètat qui vient de réussir l'Everest et publie un livre
largement diffusé pour dire leurs quatre vérités
(et quelques faussetés) à tout un chacun, accompagnées
de quelques acides remarques sur le sport de masse et rythmées
par le leitmotiv : "L'important, c'est qu'on en parle".
Mais en voilà assez parlé. Hors le récit de l'ascension,
ce livre sort du commun par les nombreuses incidentes qui, faute de permettre
au lecteur de se faire un jugement serein et argumenté, l'aideront
à se poser quelques questions pertinentes.
Vincent RENARD.
et la suite... dans la Revue " Montagne
et Alpinisme" N°2 - 1979 :
A la suite de la critique
du livre publiée dans notre n° 1/1979 consacrée à
Everest 1978, nous avons reçu la mise au point suivante que Pierre
Mazeaud nous prie de publier :
Etonné, non par les critiques à mon endroit (mêmes
injustifiées), j'ai relevé dans l'article consacré
à mon livre Everest 1978 certaines erreurs qui relèvent
de la malhonnêteté indiscutable. II m'est donc apparu nécessaire
de les souligner afin que le lecteur ait un éclairage plus exact
que celui qu'a voulu donner Monsieur Renard.
Laisser supposer que j'ai écrit (en pratiquant les guillemets pour
affirmer la citation ainsi que le numéro de la page "72")
"l'important c'est qu'on en parle" n'est pas simplement
fantaisie de critique mais volonté délibérée
de nuire. Non seulement je ne l'ai pas écrit, mais j'ai parfaitement
indiqué que, la réussite ayant une meilleure résonance
que l'échec (toutes les réussites), il était bon
que notre victoire - celle de l'équipe toute entière - soit
soulignée, même par les médias; que Monsieur Renard
ne partage pas ce sentiment, libre à lui. Par contre que la malhonnêteté
le conduise à inventer une citation (en allant jusqu'à préciser
la page) permet aisément de le juger.
Deuxième erreur qui se confond plus volontiers avec de la malveillance.
De quel règlement de compte entend parler l'auteur de la critique
? Veut-il rappeler que le Président du Comité de l'Himalaya
était il l'est peut être toujours conseiller technique d'une
marque dont nous n'avons eu qu'à nous féliciter de ses produits,
mais les tentes K 2 trop complexes ? Ajouter que j'accuse injustement
ce même Président relève de la fantaisie la plus pure.
Je ne fais que de rappeler que, n'étant pas favorable (pour des
raisons que je respecte et qui lui sont personnelles) à notre expédition,
Robert Paragot a bien eu la conversation que j'ai reproduite avec l'un
de mes coéquipiers.
Enfin et c'est là sans doute ce qui m'apparaît être
le plus grave, Vincent Renard laisse entendre que mes critiques sur les
seules tentes K 2 (qui relèvent plus de l'humour mais sait-il ce
que c'est!) conduiront la maison Jamet à ne plus aider les futures
expéditions. C'est considérer sévèrement cette
grande maison d'articles de sport dont la renommée n'est plus à
faire, c'est surtout conduire les membres des futures expéditions
à un jugement inexact. Quel fournisseur sans risque pour sa réputation
prendrait une telle mesure de rétorsion ? Comment laisser croire
que je n'ai voulu que porter préjudice aux jeunes générations,
alors que je me contente d'indiquer combien par mauvaises conditions atmosphériques
le montage des K 2 est difficile ?
Fantaisiste, Monsieur Renard, non point. Délibérément
malveillant, voire malhonnête. Alors un conseil, puisque j'abuse
(paraît-il c'est vous qui l'écrivez) "de ma position
de force d'ancien Secrétaire d'Etat" encore que volontairement
je n'ai pas demandé l'appui des pouvoirs publics, précisément
pour éviter ce reproche vous considérerez qu'il vous faudra
désormais, comme tout critique digne de ce nom, connaître
vos responsabilités et ne pas dépasser des limites qui conduisent
parfois non dans le simple droit de réponse mais devant les tribunaux.
Pierre MAZEAUD.
Vincent Renard nous fait parvenir
le texte ci dessous que nous publions au même titre que le texte
de Pierre Mazeaud:
Le poète chinois Li Fu écrivait : "A la pleine lune,
le muscardin qui écume s'observe dans le lac et mord la brume".
Nous demandons aux lecteurs de bien vouloir excuser une légère
erreur de citation et suggérons à ceux qui n'ont pas souhaité
dépenser 52F pour acheter Everest 1978 et veulent éclairer
leur lanterne, de l'emprunter à la bibliothèque du C.A.F.
et de se reporter en particulier aux pages 71 et 98.
Pour le reste, l'important c'est qu'on n'en parle plus.
Vincent RENARD.
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