CRITIQUES DE LIVRES

The Ascent of Nanda Devi - L'ascension du Nanda Devi

 

 

par H. W. TILMAN

Cambridge University Press, 1937

Payot, Paris, 1938.

(Revue " La Montagne" - No 303, 1939)

Au mois de septembre 1936, au moment précis où l'Expédition anglaise à l'Everest et l'Expédition française au Hidden Peak rentraient vaincues, par la mousson prématurée au Tibet et le mauvais temps local au Karakoram, on apprenait par un télégramme laconique, passé par la presse anglaise, que deux alpinistes, dont on ne donnait même pas les noms, membres d'une équipe anglo américaine, avaient atteint le sommet du Nanda Devi, la plus haute montagne de l'Empire Britannique et la plus haute gravie jusqu'ici (1).

Quelques semaines plus tard on sut que les deux vainqueurs étaient H. W. TILMAN qui, en 1934, avait reconnu la seule voie d'accès de la montagne, et N. E. ODELL, l'un des compagnons de MALLORY à l'Everest en 1924. Les autres membres de l'expédition étaient le Dr. Graham BROWN, C. HOUSTON, W. F. LOOMIS, P. LLOYD, A. EMMONS et A. CARTER.

L'entreprise avait été menée avec un minimum de publicité et un maximum d'efforts : très peu de porteurs, dont seulement cinq Sherpas, pas très bons; un matériel réduit, pas d'oxygène, pas de pitons. La malchance, qui assaille toutes les expéditions dans l'Himalaya, n'avait pas épargné celle ci : désertion des coolies recrutés dans le Garhwal, ce qui oblige à faire deux fois le parcours de la terrible gorge de Rishi avec de lourdes charges; un très mauvais temps qui, après quelques accalmies, devient si menaçant, à la fin de l'expédition, qu'il est impossible d'envoyer une seconde cordée au sommet; différents accidents, allant de la mort d'un Sherpa à la perte de plusieurs charges de provisions. En dépit de tout cela, en dépit de la difficulté de l'escalade, d'une très mauvaise neige et de rochers pourris et verglacés, le sommet fut atteint.

H. W. TILMAN fait un récit remarquable de ce magnifique exploit. Son style est très simple; ce qui ne l'empêche pas de savoir faire vivre les paysages et les personnages. Il faut tout particulièrement signaler les pages consacrées au long trajet à travers le Rishi Nala, à la montée à toute vitesse au camp V, lorsqu'un message mal compris fait croire qu'un accident grave s'est produit, et à l'escalade finale.

Le Dr. LONGSTAFF l'une des principales autorités sur toutes les questions qui touchent à l'Himalaya, a écrit une courte et excellente préface au volume.

Une traduction française du volume de H. W. TILMAN vient de paraître; elle est due à M. Granjux La lecture en est agréable, mais le texte n'est par exempt d'erreurs. Il faudrait aussi s'entendre sur l'altitude du sommet. Le Nanda Devi a 25.645 pieds, c'est à dire 7.821 m. 70. Sur la couverture et la page de garde, l'auteur de la traduction lui en attribue 8.548, sur la carte de la page 13, 8.434. C'est trop, dans les deux cas; aucun sommet de 8.000 mètres n'a encore été gravi.

(1) Le récit de cette ascension par H. W. TILMAN a été publié dans La Montagne 1938, pp. 139-152.


Claire-Eliane ENGEL