CRITIQUES DE LIVRES
LA REVANCHE DE L'HIMALAYA,
L'aventure humaine au Nanga Parbat
par Jean-Pierre FRESAFOND.
(Les éditions Jacques Marie Laffont et associés, Lyon. 1980)
(Revue " La Montagne et Alpinisme" - No 123, 1981)
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Encore un récit d'expédition ? Oui, et l'on pourrait même craindre le pire devant la banalité du plan où l'on retrouve le projet, les préparatifs, la composition de l'équipe, la place du Nanga Parbat (objectif de cette expédition lyonnaise) dans la géographie et dans l'histoire, le voyage, la marche d'approche, l'assaut, sans parler des "hommages aux fournisseurs" qui font désormais partie du rituel sinon du dogme des expéditions. Seulement, il y a la personnalité de l'auteur, Jean-Pierre Frésafond, "Frèse" pour les intimes, sorte de soudard des cimes, grand coeur et grande gueule, une force vitale qui cherche à s'épancher et se met au service des copains, que cela leur plaise ou pas. |
Le récit de cette tentative avortée contre ce pic de plus de 8 000 m est à l'image de son auteur, plein de vie et de fureur, foisonnant, généreux jusqu'à l'outrance, parfois sommaire dans ses conclusions, mais toujours libre de sa franchise. On aime ou on n'aime pas. Sur le bûcher de l'hérésie y aurait-il place pour la tiédeur ? Cette revanche de l'Himalaya ressemble aussi, il faut l'avouer, au règlement de compte du "chef" au terme d'une aventure humaine où l'on avait, avec un rien de précipitation, baptisé "équipe" un conglomérat de fortes individualités. Point de vue non dénué d'amertume sur le psychodrame vécu par ce groupe de grimpeurs qui se désagrège à mesure que s'éloigne l'espoir du succès. Point de vue désabusé d'un bénévole à tout crin sur des rapports sociaux que l'argent pourrit, sur les arrière-pensées financières des uns et des autres, sur les débuts de la lutte syndicale entre porteurs et "sahibs" qui se déclare au Pakistan, sur la difficulté de vivre en groupe dans le champ clos du désert himalayen, sur les affrontements d'intérêts que suscite un milieu alpin où le sponsor devient roi et la pub un idéal. Dans la préface qu'il a écrite pour ce livre de son ami Frésafond, Pierre Mazeaud déclare: "J'ai aimé ce livre, même si je ne partage pas toutes les analyses de l'auteur. Je l'ai aimé parce que les hommes y sont à découvert". II n'est pas le seul. Pierre MINVIELLE. |